Lettre ouverte au président de la République
Excellence Monsieur le Président de la République,
Les journalistes et leurs organisations sont mécontents ; ils sont en attentes depuis des années déjà d’un nouveau cadre juridique pour leur protection, bien plus, pour la fin de l’impunité des crimes contre des journalistes. Une de vos promesse de campagne lorsque vous opériez le choix de la démocratie après votre accession à la magistrature suprême le 06 novembre 1982.
La commémoration le 02 novembre 2022 de la 10ème édition de la « Journée Internationale pour mettre fin à l’Impunité des Crimes contre les Journalistes », me donne l’occasion avec tous les respects que je dois à Votre Excellence, de vous saisir par lettre ouverte sur la portée politique des arrestations et crimes perpétrés sur des journalistes, et les implications sur la paix sociale.
Je me le permets à deux titres, d’abord en tant que l’un des responsables de l’UN Press Club, ensuite en ma qualité de leader syndical des journalistes au Cameroun. Pour être précis, je réponds à la carte de membre N°CM371 de la Fédération Internationale des Journalistes. C’est donc pour moi un privilège doublé d’un devoir que de défendre une profession et un métier inscrit au cœur de toutes sociétés modernes.
Monsieur le Président, le nombre de crimes perpétré à l’encontre des journalistes dans l’exercice de leur profession est en nette progression cette dernière décennie. Entre 2017 et 2021, plus d’une vingtaine d’exactions sur des journalistes ont été recensées. Ces violations de la presse et de la liberté d’expression demeurent pour la plupart impunis, quand bien même les auteurs de ces actes seraient connus.
Pourtant, l’importance et le rôle d’informer le public que jouent les journalistes, les médias et la presse ne sont plus à démontrer au sein d’un État de droit. Cependant, cela n’exclut pas que les journalistes sont la cible d’agressions, d’attaques, d’arrestations, de détentions arbitraires et toutes sortes d’abus pour les réduire au silence. Des statistiques font état de ce que 2 crimes sur 3, perpétrés sur des journalistes sont restés impunis. Monsieur le Président, jusqu’à quand ces crimes et exactions en direction des journalistes continueront-ils de rester impunis ? Jusqu’à quand notre société continuera-t-elle de garder le silence, face à des assassinats, disparitions et meurtres de journalistes ? Des traitements inhumains et dégradants au prix de leurs vies, du fait de leur travail d’information du public, sont sans cesse récurrents.
Excellence Monsieur le Président, depuis la révolution saluée des textes de 1990 sur les libertés d’associations et d’expression, le temps semble s’être arrêté dans le secteur de la Presse. La situation du journaliste camerounais n’a véritablement pas changé. Cette logique reflète-t-elle la volonté de ne pas remettre en cause les coups portés sur des journalistes et au pluralisme des médias ?
La question vaut d’être posée car aujourd’hui rien n’a été fait pour sérieusement réformer le système des aides à la presse afin de garantir et préserver le pluralisme. Pire on met en cause le devenir de plusieurs entreprises de presse, amputant leurs budgets, mettant ainsi en cause l’emploi des personnels et, en conséquence, la qualité de l’information.
Monsieur le Président, faites donc quelque chose pour libérer la presse camerounaise de cette situation. Nous nous tenons prêts à vous accompagner dans ce challenge. Je serai votre humble serviteur, si vous le voulez, pour la protection ainsi que la fin de l’impunité contre les crimes portés en l’endroit des journalistes.
Cette situation est extrêmement préoccupante. C’est pourquoi à l’occasion de la journée Internationale pour mettre fin à l’impunité des crimes contre les journalistes, les organisations et syndicats de journalistes appellent le gouvernement et les parlementaires à inscrire ce projet de loi à leur agenda, pour qu’enfin notre pays soit doté d’une loi véritablement protectrice des journalistes, de leurs sources, sans laquelle, les journalistes sont en danger et les médias mis dans l’incapacité d’informer complètement les citoyens.
Les lois pour des crimes contre des journalistes doivent être votées sans plus tergiverser.
Thierry Eba, Coordination de l’UN Press Club et leader syndical des journalistes au Cameroun.