L’Ordre National des Architectes du Cameroun (ONAC) s’apprête à commémorer son cinquantenaire lors d’une semaine d’événements marquants qui se tiendront du 5 au 10 mai 2025 au Palais des Congrès de Yaoundé. C’est ce qu’a annoncé le président de l’Ordre, Jean-Christophe NDONGO, lors d’une conférence de presse tenue le 21 avril dernier. Sous le thème « Cinquantenaire de l’Ordre national des Architectes du Cameroun: Bilan, Défis et Perspectives », cette célébration sera l’occasion de revenir sur un demi-siècle de dévouement au service de la société camerounaise, d’analyser les enjeux actuels de la profession et d’envisager les perspectives d’avenir.
Le programme provisoire détaille une cérémonie d’ouverture et des conférences sur le patrimoine le lundi 5 mai, coïncidant avec la Journée mondiale du patrimoine africain. Les journées suivantes seront consacrées à la poursuite des conférences sur le patrimoine, à un sommet africain des ambassadeurs juniors et à des portes ouvertes. Le mercredi 7 mai sera dédié aux échanges internationaux avec des formations et des débats sur l’avenir, avec une matinée spéciale consacrée à l’Italie et à des rencontres B2B entre entreprises italiennes et camerounaises. Les jeudi 8 et vendredi 9 mai seront axés sur des laboratoires thématiques (bilan, défis et perspectives) et des conférences spéciales. Le point culminant de la semaine sera la journée du samedi 10 mai, avec une assemblée générale, une cérémonie de prestation de serment pour 165 nouveaux architectes et une soirée de gala durant laquelle 50 architectes ayant marqué l’histoire de la profession seront honorés, ainsi que les anciens présidents de l’Ordre et de l’assemblée générale, le premier architecte camerounais diplômé et la première femme inscrite au tableau de l’ordre.
Cette célébration s’annonce comme un moment clé pour la profession d’architecte au Cameroun, offrant une plateforme de réflexion, d’échange et de projection vers un avenir où l’architecte occupe une place centrale dans le développement du pays.
Fort de ses 50 ans d’existence et de son rôle de régulateur de la profession, l’Ordre National des Architectes du Cameroun entend désormais adopter une posture proactive pour l’avenir du développement urbain et architectural du pays. Le président Jean-Christophe NDONGO a clairement exprimé cette volonté lors de sa conférence de presse, soulignant la nécessité pour l’ONAC de dépasser son rôle de simple récepteur de commandes publiques.
“Nous ne devons plus attendre que les pouvoirs publics nous disent ce qu’il faut faire, nous devons faire des propositions“, a affirmé avec conviction M. NDONGO. Dans cette optique, l’Ordre est sur le point de finaliser une convention de partenariat avec son ministère de tutelle, le Ministère de l’Habitat et du Développement Urbain (MINHDU). Cette convention permettra à l’ONAC de soumettre des propositions concrètes pour le développement des quartiers, initiant ainsi une nouvelle ère de collaboration où l’expertise des architectes sera sollicitée en amont des appels d’offres. La convention, actuellement sur la table du ministre, devrait être signée prochainement.
Parallèlement à cette démarche proactive, l’ONAC intensifie sa lutte contre l’exercice illégal de la profession. “Dès que nous sommes au courant, nous envoyons des sommations à ces personnes en leur demandant de nous présenter dans un délai de 48 heures leur attestation d’attribution à l’Ordre et leurs diplômes d’architecte. À partir du moment où rien n’est fait, nous les attaquerons en justice“, a déclaré le président.
Des plaintes ont déjà été déposées contre plusieurs individus usurpant le titre d’architecte.
Cette fermeté se justifie par la situation démographique actuelle, qui révèle un déséquilibre significatif entre le nombre d’architectes et la population. Avec un architecte pour 100 000 habitants, il est difficile pour la profession de couvrir efficacement l’ensemble du territoire camerounais. Si les responsabilités sont partagées, un effort d’éducation du public sur le rôle essentiel de l’architecte est primordial.
L’inscription prochaine de 165 nouveaux architectes le 10 mai prochain est un pas dans la bonne direction pour combler progressivement ce vide.
Au-delà de la régulation, le cinquantenaire sera l’occasion d’un bilan exhaustif des actions menées depuis la création de l’Ordre, dont les racines remontent à 1962, bien que les textes fondateurs aient été établis en 1975, succédant à une législation de 1947. Des ateliers et des groupes de travail se pencheront sur les réussites et les défis rencontrés durant ces cinq décennies.
Pour les 50 prochaines années, l’ONAC ambitionne de devenir un ordre fort, avec des architectes compétents, présents et consultés au sein des différentes structures décisionnelles. L’évolution technologique, notamment l’arrivée de l’informatique et l’essor de l’intelligence artificielle, représente un défi et une opportunité pour la profession. L’objectif est de parvenir à un ordre structuré, où l’exercice illégal sera minimisé, où les architectes seront rémunérés à leur juste valeur et où leur contribution sera pleinement reconnue par les pouvoirs publics. Le président NDONGO a déploré le manque de reconnaissance actuel, où les architectes sont rarement cités lors des inaugurations de bâtiments, et a insisté sur la nécessité de voir les architectes signer leurs œuvres.
Le cinquantenaire sera l’occasion de mettre en lumière des bâtiments emblématiques et les architectes qui les ont conçus.
Les chiffres clés de la profession témoignent de son évolution : depuis 1962, 663 architectes ont été inscrits au tableau de l’Ordre. En 2024, 423 architectes sont en activité, dont 61 femmes, représentant 14,42% de la profession. Avec l’arrivée des 165 nouveaux diplômés en mai 2025, et les 81 cabinets d’architecture recensés, la profession est en pleine croissance.
Un aspect crucial pour l’avenir est la promotion d’une architecture durable ancrée dans le contexte africain. “Il faut que les Africains cessent de croire que l’architecture durable vient de chez les autres”, a martelé le président. Pour renforcer cette durabilité, l’ONAC entend encourager un retour aux sources, en s’inspirant de l’architecture identitaire locale. Une série de conférences sur le patrimoine questionnera l’architecture ancestrale afin d’en extraire des éléments pertinents pour enrichir l’architecture contemporaine camerounaise.
Le cinquantenaire de l’Ordre National des Architectes du Cameroun s’annonce ainsi comme un moment charnière, marquant une volonté affirmée de la profession de jouer un rôle moteur dans le développement d’un environnement bâti de qualité, respectueux de l’identité culturelle et des impératifs de durabilité.
Fondé officiellement en décembre 1975, l’ONAC a joué un rôle crucial dans la structuration et la régulation de la profession d’architecte au Cameroun, favorisant la compétence et l’excellence. Cependant, comme l’a souligné le président NDONGO, l’histoire de l’ordre remonte plus loin, avec l’inscription des trois premiers architectes au tableau de l’ordre dès 1962, suite à l’arrivée du premier architecte camerounais diplômé en 1959. Il est important de noter que la profession était déjà encadrée par une loi datant de 1947, initialement applicable au territoire français d’outre-mer dont faisait partie le Cameroun. Cette législation camerounaise a d’ailleurs servi de modèle à plusieurs pays de la sous-région, témoignant du rôle pionnier du Cameroun dans l’organisation de la profession architecturale en Afrique. L’ONAC a également marqué l’histoire en organisant le tout premier congrès de l’Union des Architectes d’Afrique (UAA) à Yaoundé en 1984.
Si les premières années suivant 1975 ont été marquées par une période de dynamisme et une économie florissante, la profession a dû faire face à des défis considérables à partir de 1985, avec la crise économique mondiale et l’adoption du programme d’ajustement structurel en 1987. Cette période a entraîné un exode de certains architectes face au manque de marché. L’Ordre a su se mobiliser, aboutissant à la promulgation de la loi de 1990 qui a renforcé le cadre légal de la profession. Plus récemment, l’arrivée de nouvelles écoles d’architecture et l’augmentation du nombre de diplômés, dont les premiers formés au Cameroun inscrits en 2021, ont marqué une nouvelle étape. L’intégration des innovations numériques et l’adoption de concepts durables sont également des évolutions notables, malgré la persistance de défis tels que l’exercice illégal de la profession et la concurrence étrangère.
La célébration de ce cinquantenaire se veut une plateforme pour valoriser l’héritage de l’ONAC et l’impact des architectes sur le paysage urbain et architectural camerounais. Elle vise également à sensibiliser le public à l’importance de l’architecture et de l’urbanisme dans le développement durable, à anticiper les défis futurs en matière de formation, de réglementation et de meilleures pratiques, et à encourager les collaborations interdisciplinaires. L’événement sera aussi l’occasion de promouvoir l’adoption des innovations technologiques et de renforcer la visibilité de l’Ordre auprès des autorités, des médias, du grand public et des partenaires internationaux.
Un programme riche et varié attend les participants durant cette semaine de célébration. Parmi les activités phares, on retrouve une cérémonie d’ouverture officielle, des conférences et panels animés par des experts nationaux et internationaux sur des thèmes cruciaux tels que le patrimoine architectural, l’architecture durable et les innovations technologiques. Des expositions mettront en lumière les projets emblématiques réalisés par les architectes camerounais, ainsi que des conceptions novatrices. Des ateliers et des formations seront proposés pour renforcer les compétences professionnelles. Le programme inclut également des visites guidées de sites historiques et de projets architecturaux emblématiques, des tables rondes pour débattre des enjeux actuels, ainsi que des activités culturelles et sociales.