La Commission Nationale Anti-Corruption (CONAC) a présenté son rapport d’activités pour l’année 2024 à Yaoundé ce 27 Août 2025. Devant un public de personnalités de haut rang, le Révérend Dr Dieudonné Massi Gams, président de la CONAC, a révélé les grandes lignes de ce document de plus de 400 pages, dressant un bilan nuancé de la lutte contre la corruption au Cameroun.
Sur le plan institutionnel, Le document note que seules les activités de la CONAC sont présentées dans le rapport, une situation qui contredit les articles 38 et 39 de la Convention des Nations Unies Contre la Corruption sur le partage d’informations et l’assistance mutuelle. Pire encore, des ministères clés comme ceux de l’Administration Territoriale, de la Communication, de l’Eau et de l’Énergie n’ont pas fourni leurs contributions pour la deuxième année consécutive, une situation qualifiée de “refus de collaboration”. La CONAC a également noté l’absence de contributions de la part des autorités religieuses, considérées comme des “piliers d’intégrité” dans la stratégie nationale.

Une coopération institutionnelle à deux vitesses
Le rapport 2024 met en lumière les activités de la CONAC en matière de coopération, tout en pointant du doigt les faiblesses persistantes. Au niveau national, la commission a signé 24 accords de partenariat, dont un avec le Ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille pour renforcer les capacités et mener des campagnes de sensibilisation. La collaboration s’est également étendue à 22 radios communautaires pour la diffusion de messages anti-corruption et a impliqué trois artistes musiciens dont les chansons sont utilisées pour la sensibilisation du public. Ces partenariats témoignent de la volonté de la CONAC d’élargir son champ d’action et d’impliquer une diversité d’acteurs dans la lutte.
Cependant, le rapport déplore un manque de collaboration de la part de certaines institutions.
Le renforcement des capacités : un pilier de la stratégie anti-corruption
La CONAC a mis un accent particulier sur la formation pour armer les acteurs de la lutte contre la corruption. Plus de 550 personnes ont bénéficié de renforcement de capacités, parmi lesquelles des chefs de Cellules de Lutte Contre la Corruption, des stagiaires de l’École d’État-Major de Yaoundé, des auditeurs de l’ENAM, et des membres de Clubs d’Intégrité.
En retour, le personnel de la CONAC a profité de formations dispensées par des partenaires nationaux de renom, comme la Chambre des Comptes de la Cour Suprême, le Ministère des Finances, l’ANTIC et l’ENAM.
Au niveau international, la CONAC s’est positionnée comme un acteur clé. Une délégation a participé à la 14e Conférence Annuelle des Agences de Lutte Contre la Corruption en Afrique, à Accra, où le Cameroun a été désigné pour accueillir la 16e édition en 2026. Douze cadres ont été formés au Commonwealth Africa Anti-corruption Centre au Botswana, et une visite d’étude en Sierra Leone a permis de découvrir des techniques non-judiciaires de recouvrement des biens issus de la corruption.
Un engagement variable des institutions
Le rapport 2024 est la quatorzième édition depuis 2012 et repose sur l’exploitation de 105 contributions, une augmentation notable de 21 par rapport aux 84 reçues en 2023. Cette progression est principalement due à l’accroissement des contributions des Établissements et Entreprises Publics, passées de 27 à 44. De plus, deux ministères, l’Agriculture et du Développement Rural et la Délégation Générale à la Sûreté Nationale, ont repris leur collaboration après une absence en 2023.
Toutefois, le rapport déplore le manque de rapport de l’Agence Nationale d’Investigation Financière sur la lutte contre le blanchiment d’argent, qui n’a pas transmis son rapport d’activités, rompant avec une tradition établie. Malgré ces défis, la CONAC se réjouit de la collaboration continue du Procureur Général près le Tribunal Criminel Spécial et de la Société de Recouvrement des Créances du Cameroun, dont les rapports sur les restitutions et les recouvrements des créances sont essentiels.
En résumé, le rapport 2024 de la CONAC dresse un tableau contrasté. Si des avancées significatives sont observées en matière de sensibilisation et de formation, la lutte contre la corruption se heurte encore à des poches de résistance et à un manque de coopération institutionnelle qui freinent les efforts. Le document, rendu public conformément au décret de 2006, appelle à un engagement plus fort et plus coordonné de toutes les parties prenantes pour relever le défi de la corruption au Cameroun.