Sous l’impulsion du Parti Écologiste Camerounais (PEC) et de son président, Eric Ngueguim, des représentants de partis politiques de tous bords – dont le puissant Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), le Social Democratic Front (SDF) et le Parti Démocrate Camerounais pour le Changement (PDCC) du président Atemengue ainsi que des figures majeures de la société civile , ont scellé par leur signature un engagement historique ce 18 Septembre 2025 : le Pacte Écologiste 2025.
Cet acte solennel et inédit vise à placer la transition écologique et la justice sociale au cœur des priorités nationales, proposant une feuille de route ambitieuse pour un « Cameroun plus juste, en paix et respectueux de son environnement ». Loin d’être une simple déclaration d’intention, ce pacte se présente comme un contrat moral et politique contraignant, susceptible de redéfinir le paysage programmatique à l’aube d’un cycle électoral crucial.

Une Convergence Politique Inédite à l’Heure des Choix Décisifs
La tenue de cet événement à quelques mois de l’élection présidentielle et d’autres scrutins locaux n’est pas un hasard. Pour Eric Ngueguim, il s’agissait d’une nécessité impérieuse. « Nous sommes à la veille de l’élection présidentielle et de plusieurs autres élections à venir. Il est important que les partis politiques prennent conscience que ce que demande la majorité des Camerounais, la jeunesse, c’est que l’environnement soit repris dans le programme politique », a-t-il déclaré lors de son allocution.
Son plaidoyer va bien au-delà de la simple protection des forêts ou de la faune. Il inscrit l’écologie dans une vision systémique et pragmatique du développement. « Il n’y a aucun scanner dans un hôpital qui peut fonctionner s’il n’y a pas d’énergie », a-t-il illustré, établissant un lien direct et tangible entre la crise environnementale, la souveraineté énergétique et l’effondrement des services publics essentiels comme la santé. « L’énergie est à la base de tout (…) On ne saurait pas aujourd’hui développer ou mettre en œuvre une certaine politique sans toutefois tenir compte du volet énergétique, du volet environnemental. »
La présence de délégations de partis gouvernementaux et d’opposition constitue un signal politique fort. Elle témoigne d’une prise de conscience, peut-être tardive, de l’urgence à agir face à l’épuisement d’un modèle de développement et à la pression croissante d’une jeunesse en demande de réformes profondes. « Changer le Cameroun, nous n’avons pas la prétention de le faire tout seul », a concédé Ngueguim, soulignant la nature collective et inclusive de cette démarche.
La Rupture avec un Modèle Épuisé : Un Impératif de Survie
Le Pacte Écologiste 2025 part d’un constat sans appel : la poursuite du « business as usual » mène le Cameroun droit dans le mur. Le texte dénonce les conséquences désastreuses du statu quo : l’appauvrissement accéléré des ressources naturelles, l’aggravation des inégalités sociales et la vulnérabilité extrême du pays face aux chocs climatiques, dont les manifestations – inondations, sécheresses, érosion côtière – se multiplient.

L’erreur, selon les signataires, serait de croire qu’il est encore temps de temporiser. Le Pacte se veut donc la première pierre d’un vaste chantier de transformation, une « mobilisation générale » qui doit impliquer l’État, les collectivités territoriales, le secteur privé et chaque citoyen. Il ne s’agit plus de simples ajustements techniques, mais d’une refonte complète des priorités nationales.

20 Mesures Prioritaires : Une Feuille de Route Concrète pour les 100 Premiers Jours
Le cœur du Pacte réside dans sa proposition opérationnelle : une série de 20 mesures prioritaires que les signataires s’engagent à mettre en œuvre dès les 100 premiers jours de leur mandat, si ils venaient à être élus. Structurées autour de trois piliers fondamentaux, ces mesures dessinent les contours d’un nouveau projet de société.
1. La Souveraineté Alimentaire (« Faim Zéro »)
La sécurité alimentaire est érigée en enjeu de survie nationale. Pour émanciper le Cameroun de sa dépendance aux importations, le pacte propose :
- La création d’une banque nationale des semences paysannes pour préserver la biodiversité agricole.
- Le renforcement de l’agriculture biologique et agroécologique via des subventions et une réforme foncière verte.
- La mise en place d’un Fonds de souveraineté alimentaire et d’un programme de cantine scolaires locales.
- La garantie d’un accès équitable à la terre pour les femmes et les jeunes.
- La régulation stricte des OGM et des pesticides chimiques.
2. L’Atténuation et l’Adaptation au Changement Climatique
Face à la menace climatique, le pacte mise sur des actions audacieuses :
- L’adoption d’une loi nationale climat avec un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 30% d’ici 2030.
- Un programme national de transition énergétique massive vers le solaire et l’électrification verte des bâtiments.
- L’interdiction progressive de l’importation de véhicules thermiques d’occasion de plus de 10 ans.
- L’instauration d’une taxe carbone nationale sur les industries polluantes, recyclée dans le financement de la transition.
- La création d’un Fonds climat-jeunesse pour soutenir l’entrepreneuriat vert.
3. La Préservation de la Biodiversité et des Forêts (« Vie Terrestre »)
Pour protéger le capital naturel exceptionnel du pays :
- Un moratoire sur la déforestation industrielle dans les bassins forestiers sensibles.
- Un ambitieux programme de reboisement avec 50 millions d’arbres plantés d’ici 2030.
- La création d’une Brigade verte nationale contre le braconnage et l’exploitation illégale du bois.
- L’intégration de l’éducation environnementale à tous les niveaux du système scolaire.
- La protection renforcée des forêts communautaires et des droits des peuples autochtones.
Une Vision Transformative : Au-Delà des Mesures
Le Pacte Écologiste 2025 ne se limite pas à une liste de mesures. Il porte une vision économique et sociale transformative, axée sur une fiscalité écologique solidaire. Il propose notamment d’évaluer l’impact de toute nouvelle loi sur les 10% les plus pauvres et sur les objectifs de développement durable.
Il prône également un désengagement stratégique de la dépendance aux énergies fossiles, avec un réinvestissement massif dans le maillage ferroviaire du territoire. Enfin, pour garantir sa crédibilité, le pacte inclut une clause de contrôle citoyen avec la création d’un mécanisme indépendant de suivi et la publication d’un rapport annuel d’évaluation écologique, assurant ainsi une transparence et une redevabilité indispensables.
Un Point de Départ plus qu’un Aboutissement
La signature du Pacte Écologiste ce 18 septembre 2025 à Yaoundé est un événement fondateur. Elle marque l’entrée de l’écologie politique dans l’arène mainstream camerounaise, non plus comme une préoccupation marginale, mais comme le pilier central d’un projet de société viable.
Reste maintenant la partie la plus difficile : traduire ces engagements en actes concrets. Le véritable test interviendra dans les urnes, puis dans les 100 premiers jours du prochain mandat. Ce pacte est un serment fait à la jeunesse et aux générations futures. Sa force résidera dans la vigilance constante de la société civile et des citoyens pour s’assurer que les signatures apposées au bas du document ne restent pas lettre morte, mais deviennent le acte de naissance d’un Cameroun nouveau, résilient et véritablement durable.