À la suite de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle par le Conseil constitutionnel, le Ministre de l’Administration Territoriale, Paul Atanga Nji, a tenu un point de presse ce 28 Octobre, pour dresser un bilan de la situation dans le pays. Alors que Paul Biya, candidat du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), a été déclaré vainqueur avec 53,66 % des suffrages, le gouvernement est confronté à une vague de contestation et de violences qu’il impute au candidat de l’opposition, Issa Tchiroma.
D’emblée, le ministre a tenu à souligner le déroulement globalement apaisé du scrutin. Il s’est appuyé sur les rapports d’observateurs nationaux et internationaux pour affirmer que l’élection s’était déroulée “dans la transparence et le calme sur toute l’étendue du territoire national“. Cette mise en contexte vise à établir la légitimité du processus électoral et du résultat proclamé.
L’autoproclamation de l’opposant et le déclenchement des violences
Le point central de l’intervention du ministre a été la dénonciation des actions d’Issa Tchiroma, candidat du Front pour le Salut National du Cameroun (FSNC). Ce dernier est accusé de s’être “autoproclamé vainqueur” du scrutin dès le 14 octobre, en violation du code électoral. Selon Paul Atanga Nji, cet acte “irresponsable” est à l’origine d’un “projet de déstabilisation” du pays.
Le gouvernement lui reproche d’avoir lancé, via les réseaux sociaux, des “appels répétés à l’insurrection populaire“. En réponse à ces appels, des manifestations violentes auraient été organisées, notamment la veille et le jour de la proclamation officielle des résultats.
Un lourd bilan matériel et humain
Le ministre a dressé un inventaire détaillé des dégâts attribués à ces “actes de vandalisme” :
- Édifices publics incendiés ou saccagés : sous-préfectures de Bandja dans le Haut-Nkam, Ngong, Figuil et Cheboa dans la Bénoué; du parquet de Guider; du palais de justice de Dschang; de la Mairie de Mandjou; de la brigade de gendarmerie de Ngong; des antennes ELECAM de Ngong, Bandja, Mandjou, Figuil; des résidences des Maires de Garoua, Mandjou et Figuil; du matériel roulant de plusieurs unités de police et de gendarmerie.
- Biens privés et commerces vandalisés : Scènes de pillage signalées à Douala et dans d’autres localités, visant des stations-service, boutiques et magasins.
- Pertes en vies humaines : Le ministre a déploré la mort de plusieurs enseignants et de graves blessures parmi les forces de l’ordre lors des affrontements.
Des enquêtes ont été ouvertes pour élucider les circonstances de ces “incidents malheureux”.
La réponse de l’État : fermeté judiciaire et appel à la responsabilité
Face à cette situation, le gouvernement affiche une ligne dure. Paul Atanga Nji a annoncé plusieurs mesures :
- Poursuites judiciaires : Le candidat Issa Tchiroma est explicitement désigné comme “coupable de plusieurs infractions“. Le ministre a affirmé qu’il “devra en répondre devant les juridictions compétentes” pour ses appels à l’insurrection et l’organisation de manifestations illégales.
- Menaces contre les “médias de la haine” : Un avertissement sévère a été lancé aux médias et aux utilisateurs des réseaux sociaux qui relaient des “messages séditieux“. Les “services spécialisés” collecteraient déjà ces contenus en vue de poursuites judiciaires.
- Maintien de l’ordre garanti : L’État a réaffirmé sa détermination à “veiller à ce que l’ordre règne et que la paix soit préservée” sur l’ensemble du territoire.
Malgré ces tensions, le ministre a assuré que la situation sécuritaire était “globalement sous contrôle” et a invité les Camerounais à “vaquer normalement à leurs occupations” et à être des “artisans de la paix”.
La conférence de presse de Paul Atanga Nji dessine la stratégie du gouvernement camerounais en cette période post-électorale tendue : une légitimation du processus électoral couplée à une criminalisation de la contestation. La promesse de poursuites judiciaires contre le principal candidat de l’opposition et ses soutiens marque un tournant et laisse présager une période de fortes tensions politiques, où la recherche de stabilité passera par une application stricte de la loi.


