Le Cameroun a officiellement présenté, les 10 et 11 Décembre 2025, son rapport 2023 de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE). Cérémonie présidée par le ministre des Mines, de l’Industrie et du Développement Technologique, le Pr Fuh Calistus Gentry. Cet événement à l’Hôtel Mont Febé a symbolisé bien plus qu’une simple publication : un engagement renouvelé envers une gestion vertueuse des richesses du sous-sol et un pas décisif vers la levée de la suspension du pays par l’instance internationale.
L’atelier a réuni l’écosystème complet de la gouvernance des ressources naturelles. Autour du vice-président du Comité ITIE, se sont retrouvés le ministre délégué aux Finances, représentant le Champion national de l’ITIE, des diplomates, des partenaires au développement, les dirigeants des majors pétrolières, gazières et minières, ainsi que les représentants d’administrations clés. La présence vigileante de la société civile et des médias a confirmé le caractère multipartite et inclusif de cette démarche, pilier de la philosophie ITIE.
Trois voix ont cadré les enjeux. Celles du secteur privé, par M. Thompson Mananga, et de la société civile, par M. Billy Arthur Gandjui, ont précédé l’intervention du ministre Gentry. Ce dernier a rappelé les actions structurantes du gouvernement, tout en dévoilant un chiffre majeur : 1 232,69 milliards de FCFA. C’est le montant des paiements générés par le secteur extractif en 2023, une manne essentielle, bien qu’en légère baisse, pour les finances publiques nationales.
Le Rapport 2023 : Une Ambition Élargie et Conforme aux Standards les Plus Exigeants
Aligné sur la Norme ITIE 2023, le rapport camerounais dépasse le cadre traditionnel de la comptabilisation des flux financiers. Il incarne une vision élargie de la transparence, structurée autour de plusieurs piliers innovants :
- La Transparence Radicale sur la Propriété et les Contrats : La divulgation des bénéficiaires effectifs (les véritables propriétaires des entreprises) et la publication des contrats deviennent centrales. Il s’agit d’outils puissants pour prévenir les conflits d’intérêts, la corruption et les flux financiers illicites.
- L’Inclusion des Acteurs de l’Économie Locale : Pour la première fois de manière aussi affirmée, le rapport accorde une attention particulière au secteur minier artisanal et aux carrières. Cette formalisation est cruciale pour améliorer les conditions de vie des milliers de travailleurs de ce sous-secteur et pour capter une plus grande part des recettes qui en découlent.
- L’Intégration des Dimensions Sociale et Environnementale : L’ITIE n’est plus seulement une affaire de chiffres. Le rapport s’attache à évaluer l’impact des exploitations sur l’emploi local, les redevances communautaires et le développement des territoires. La prise en compte du genre et des préoccupations environnementales devient un indicateur de performance.
- La Transition Énergétique à l’Agenda : Dans un monde en mutation, le rapport questionne la place du secteur extractif dans la transition énergétique nationale, marquant une volonté d’anticiper l’avenir.
- Vers une Transparence en Temps Réel : La Divulgation Systématique : L’objectif ultime est clair : passer d’une publication périodique de rapports à une divulgation systématique des données via les plateformes des administrations. Des mises à jour plus fréquentes et des données désagrégées (par entreprise, par région) doivent rendre l’information accessible en continu.
Un Processus Dynamique : Du Renforcement des Capacités au Débat Public
La journée du 10 décembre a illustré la dynamique opérationnelle de l’ITIE. Elle a débuté par un webinaire de renforcement des capacités animé par le Secrétariat International, préparant les experts nationaux aux nouvelles exigences techniques. La cérémonie publique a ensuite été marquée par une présentation technique détaillée du rapport par M. Karim Lourimi du cabinet ENERTEAM, suscitant un débat riche et constructif avec l’assistance.
Le ministre Fuh Calistus Gentry a, dans son allocution, salué les efforts conjugués de l’État, des entreprises et de la société civile. Il a lancé un appel vibrant à tous les acteurs pour qu’ils s’approprient ces données, les analysent et les utilisent pour alimenter le débat public et impulser des réformes concrètes. « Une belle avancée vers la levée de la suspension », a-t-il affirmé, reconnaissant ainsi le chemin parcouru et celui qui reste à faire.Un Jalon sur la Voie de la Confiance et du Développement
La publication du rapport ITIE 2023 du Cameroun est bien plus qu’une obligation procédurale. C’est un acte politique fort qui renforce la crédibilité du pays auprès des investisseurs et des bailleurs de fonds. C’est un outil d’émancipation pour la société civile et les médias, leur donnant des données vérifiées pour exercer leur rôle de contrôle. Enfin, c’est une promesse faite aux populations : celle que les richesses extraites de leur sol doivent être connues, comptabilisées et converties en bénéfices tangibles pour le développement local et national.
En élargissant son champ à l’environnement, au social et à la gouvernance contractuelle, l’ITIE au Cameroun se réinvente comme un levier essentiel non seulement pour la transparence, mais pour une justice économique et une croissance durable. La route vers la levée définitive de la suspension semble désormais tracée, portée par cette volonté affichée de placer l’intérêt général au cœur de l’exploitation des ressources naturelles.


