POLITIQUE

Présidentielle 2025: L’UPC dénonce l’auto proclamation de victoire et la dérive « anti-républicaine » d’Issa Tchiroma Bakary

Written by Annette Olinga

Dans un contexte de tension post-électorale, la voix de l’Union des Populations du Cameroun (UPC), parti historique souvent présenté comme « l’âme immortelle du peuple camerounais », s’est élevée avec force pour appeler au calme, à la raison et au strict respect des institutions. Lors d’un point de presse tenu ce 14 octobre à Yaoundé, son Secrétaire Général, l’Honorable Bapooh Lipot Robert, a fustigé avec vigueur l’autoproclamation de victoire du candidat Issa Tchiroma Bakary à l’élection présidentielle du 12 octobre, dénonçant une « imposture savamment organisée » et une « volonté avérée de déstabilisation » du Cameroun.


L’Honorable Bapooh a débuté son intervention en saluant la maturité politique et l’engagement citoyen exemplaire du peuple camerounais, qui s’est massivement et pacifiquement rendu aux urnes. Cet exercice démocratique, a-t-il souligné, témoigne de l’« enracinement démocratique de nos institutions » et de l’attachement profond de la nation à la paix.

Mais ce tableau idyllique est rapidement assombri par l’action d’un seul homme, selon le Secrétaire Général de l’UPC. Il a pointé du doigt M. Issa Tchiroma Bakary, qu’il a présenté comme un candidat animé par une « passion déchirante de vengeance haineuse » et adepte invétéré de la prise du « pouvoir par tous les moyens, même au prix du sang des Camerounais ». La preuve ultime de cette dérive, selon lui, réside dans la violation de la loi électorale par une autoproclamation prématurée.

L’autoproclamation : une imposture et un reniement

Pour l’UPC, cet acte unilatéral est bien plus qu’une simple entorse procédurale. Il s’agit d’une « imposture savamment organisée avec certains lobbies et officines qui veulent installer le chaos au Cameroun ». L’Honorable Bapooh a tenu à rappeler avec fermeté le cadre légal incontournable : « Seuls les résultats proclamés par le Conseil Constitutionnel ont une valeur légale ». Toute autre publication de chiffres, qu’elle émane d’« officines machiavéliques » ou de « laboratoires de marabouts », est rejetée avec mépris, car elle ne constitue en rien l’expression du « suffrage citoyen fondateur ».

Cette position de l’UPC s’ancre dans une lecture historique et républicaine de l’État. Le parti se présente comme la « sentinelle de l’unité nationale », rappelant avec solennité qu’« aucun parti politique dans ce pays n’a versé son sang pour que ce pays soit une république » comme l’UPC. De ce lourd héritage découle une responsabilité : veiller à ce que « le Cameroun reste un et indivisible ».

L’ironie de l’histoire n’a pas échappé à l’orateur. Il a rappelé qu’en 2018, Issa Tchiroma Bakary lui-même s’était élevé contre l’autoproclamation d’un autre candidat, martelant le 8 octobre de cette année : « Respecter les lois et les institutions de notre pays, c’est aussi montrer de la considération pour la nation dont nous sommes les fils et les filles. » Ce revirement complet est, pour l’UPC, la preuve d’une opportunisme politique qui sacrifie les principes républicains sur l’autel de l’ambition personnelle.

Le spectre de la violence et l’accusation de liens avec les sécessionnistes

L’accusation la plus grave portée par l’Honorable Bapooh concerne les affinités supposées d’Issa Tchiroma Bakary avec les mouvements sécessionnistes. Il a cité des déclarations faites par le candidat à Bamenda, dans lesquelles ce dernier aurait revendiqué des « liens avec certains leaders du mouvement terroriste sécessionniste » sévissant dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.

« Quel candidat dans ce monde peut affirmer avoir des liens avec un mouvement sécessionniste qui sème la terreur dans deux régions ? » s’est-il indigné. Cette proximité affichée est analysée comme le fondement même de la stratégie de défi du candidat. « L’option terroriste-sécessionniste qui fonde son action (…) est puérile, ridicule et inacceptable par tous les Camerounais. »

En contraste total avec ce profil jugé belliqueux, l’UPC dresse le portrait du président que le Cameroun « a certainement choisi » : un homme « courageux, sage, expérimenté, qui sait pardonner et réconcilier », un « patriote » dont le visage n’est pas marqué par la « volonté de vengeance » ou de « va-t-en-guerre ». Le parti historique oppose ainsi la figure du rassembleur à celle du diviseur, de l’homme d’État à l’aventurier politique.

Un appel à la mobilisation républicaine et à la fermeté de l’État

Face à cette crise, l’UPC lance un double appel. Le premier s’adresse au peuple camerounais. Il est invité à « garder son calme », à « redoubler de vigilance et de fermeté » et à cultiver « l’esprit de tolérance, d’abnégation et de confiance aux institutions républicaines ». Le mot d’ordre est clair : « Nous sommes condamnés à vivre-ensemble. » Il ne faut pas sacrifier cette « identité remarquable » du peuple camerounais à « l’autel d’une politique qui met l’accent sur la culture de la haine et de la vengeance ».

Le second appel, plus inattendu et d’une portée politique significative, est lancé à l’État lui-même. L’Honorable Bapooh a explicitement demandé aux autorités, « garantes de la paix et de la gestion de la sécurité », d’« assumer toutes leurs responsabilités ». Il a exigé que « celui qui défie les institutions trouve également en face de lui la froideur de la loi, la froideur de l’État ».

Cet appel à la fermeté s’inscrit dans la logique de l’alliance entre l’UPC et le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), alliance dont le but affiché était de « moderniser le cadre institutionnel » et d’instaurer un « multipartisme » et des « élections transparentes ». L’UPC se pose ainsi en garant de la stabilité de cette alliance et de l’État de droit, refusant que l’espace démocratique soit utilisé pour « déstabiliser le Cameroun ».

L’Absolu, c’est le Cameroun

Le discours de l’Honorable Bapooh Lipot Robert se clôt sur une profession de foi patriotique. « L’Absolu, c’est le Cameroun », a-t-il déclaré, résumant ainsi la philosophie politique de son parti. Dans cette perspective, toute action, toute ambition, doit être subordonnée à l’intérêt supérieur de la nation.

Plutôt que de « penser ethnie, région, village, vengeance », l’UPC en appelle à « penser d’abord République ». En ces heures cruciales où l’unité nationale est mise à l’épreuve, le parti historique enjoint à tous les Camerounais d’unir leurs efforts pour « sauvegarder la Paix, l’Unité Nationale et la Souveraineté du Cameroun ». Le message est sans équivoque : face à la dérive d’un homme, c’est la résilience de toute une nation et la force de ses institutions qui doivent triompher.

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